Page 34 - Livre_MOW2018_FR
P. 34
32 / L’OCÉAN, UN TERRITOIRE MENAÇANT ET MENACÉ
La communauté scientifique a révélé avoir compris comment
les ciguatoxines se transmettent de l’algue aux poissons, puis
à l’homme, comment ces toxines se transforment pour devenir
encore plus toxiques, et mis en avant que les toxines impliquées
étaient différentes suivant les océans.
De nombreux champs de recherche restent encore à couvrir :
identifier les toxines et les espèces de poissons les plus impor-
tantes à surveiller, mieux quantifier la toxine et son degré de toxi- Marie-Yasmine
cité, évaluer le niveau des risques suivant les espèces, modéliser Dechraoui-Bottein
la transmission de la toxine tout au long de la chaîne alimentaire Chercheur en toxicologie
depuis l’algue jusqu’aux grands carnivores, définir les méthodes environnementale
et les rythmes de surveillance, mettre en place des traitements aux laboratoires
efficaces, mesurer l’impact humain et économique de cette in- de l’environnement
toxication qui touche principalement la ceinture tropicale, dans de l’AIEA à Monaco
l’océan Indien, les Caraïbes et les îles du Pacifique, même si
elle s’étend désormais à l’Europe ou au pourtour méditerranéen.
Le risque sanitaire de la ciguatera n’est pas suffisamment
connu. Les médecins ne sont pas toujours formés pour détecter
les cas d’empoisonnement par le poisson. Il est donc important
de les prévenir, eux et les structures médicales. Un atelier de la Chercheur en toxicologie environnementale aux
Monaco Ocean Week 2018 a réfléchi à la mise en place d’un laboratoires de l’environnement de l’AIEA à Mona-
guide simple pour que les pays concernés prennent en compte
le danger et que ceux qui en sont déjà conscients, adoptent une co, Marie-Yasmine Dechraoui-Bottein dirige un pro-
méthodologie pour traiter symptômes et maladies. Cette docu- gramme de recherche sur le contrôle et la prévention
mentation doit multiplier les supports informatifs (kits, spots TV
etc.) pour sensibiliser les autorités de santé de chaque pays, les des impacts des biotoxines marines sur l’environne-
médecins et pourquoi pas la population. ment, la sécurité sanitaire des aliments et la santé
publique. Dans ce cadre-là, elle est aussi adminis-
De nombreux organismes internationaux (la FAO, l’OMS etc.)
ont pris conscience de l’importance du sujet. Comme le rappe- tratrice technique de projets nationaux, régionaux
lait Elisa Bertalet, du Global Harmful Algal Blooms, programme
de coordination internationale pour la recherche des algues, et interrégionaux de coopération technique ayant
« il n’y aura pas de solutions locales. Il faut promouvoir une stra- pour but de renforcer les capacités de gestion des
tégie globale. La ciguatera est un important problème de santé
publique, au lourd impact économique que l’on peut juguler à environnements marins des États membres, et ainsi
condition de bien connaître les mécanismes de l’intoxication et contribuer au développement socio-économique du-
d’en gérer les risques ».
rable par l’utilisation de techniques nucléaires.
Les participants qui représentaient une trentaine de pays des
régions Afrique, Asie-Pacifique, Amérique latine, Caraïbes et
Europe se sont félicités des échanges passionnants et enri- L’AIEA a organisé, en partenariat avec les Accords
chissants, des informations partagées et de la sensibilisation RAMOGE les ateliers sur les microalgues toxiques :
à mettre en œuvre auprès de tous les pays, même ceux sans
cas déclarés. Marie-Yasmine Dechraoui-Bottein (AIEA) a pour sa risques pour l’environnement, l’alimentation et la san-
part rappelé la nécessité de développer la recherche et dévelop- té et stratégie de surveillance, qui se sont déroulés
pement sur le sujet et de trouver des solutions transversales à
un phénomène de plus en plus répandu. durant la deuxième Monaco Ocean Week. Marie-Yas-
mine Dechraoui-Bottein en était la responsable scien-
tifique et technique et en dresse un bilan argumenté.