De la science à l’action : les dernières avancées de la Plateforme Océan et Climat

par | Fév. 10, 2021

Dans le théâtre des négociations internationales, les membres de la Plateforme Océan et Climat ont, cette année encore, remporté des victoires décisives. Faire de l’océan un enjeu incontournable des politiques climatiques mondiales, telle est son angle d’attaque depuis 2014. Une stratégie qui repose sur le socle de la science autant que sur l’engagement exceptionnel d’un chef d’Etat.

Premier acte : la conférence de Paris

décembre 2015

L’océan est encore le grand ignoré des négociations climatiques internationales. Des experts et décideurs du monde entier, rassemblés au sein de la Plateforme Océan et Climat et soutenus par la Fondation Prince Albert II de Monaco, ambitionnent de faire mouche lors de la COP 21. Comment négliger plus longtemps le plus grand territoire planétaire quand il est question de dérèglement climatique ? L’horizon d’une mobilisation mondiale en faveur du climat resserre la stratégie de ce groupement qui réunit aujourd’hui près de 85 organisations internationales. Les membres de ce réseau lancent l’Appel de l’océan pour le climat, qui suscite plus de 30 000 signatures. Dans les coulisses de la Conférence, l’océan fait son entrée au début de la scène de la convention Climat, s’imposant comme un partenaire dont on aurait mésestimé la puissance dramaturgique. Tandis que 195 Etats adoptent l’Accord de Paris, 22 signent la déclaration « Because The Ocean » initiée par Monaco et le Chili. Les Etats membres de la déclaration (à présent au nombre de 39), dont Monaco, appellent aussitôt le GIEC à produire un Rapport spécial sur l’Océan. 

Second acte : le dernier rapport du GIEC

septembre 2019

La déclaration Because The Ocean contribue, avec l’engagement conjoint de la Fondation Prince Albert II de Monaco et du gouvernement de la Principauté, à solliciter le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat de l’ONU (GIEC). Deux ans après leur première réunion à Monaco, les experts finalisent leur Rapport spécial sur l’océan et la cryosphère, une synthèse de taille (1 170 pages) à la pointe de la recherche. Depuis trente ans d’évaluation des changements climatiques, c’est le tout premier rapport du GIEC consacré à leurs conséquences sur les écosystèmes côtiers et marins. Sur invitation de S.A.S le Prince Albert II, les 195 pays membres du GIEC sont venus en Principauté valider et présenter les conclusions du Rapport, faisant de Monaco un hot spot de l’engagement pour le climat

Les climatologues se sont accordés sur l’accélération des phénomènes tels que le réchauffement et l’acidification ou la désoxygénation des eaux marines, l’élévation du niveau de la mer, la dégradation des écosystèmes marins et des zones gelées. Certains bouleversements sont déjà irréversibles, d’autres annoncent la nécessité d’anticiper les impacts sur les populations, notamment la montée des eaux. Au total, plus d’un quart des habitants de la planète est directement menacé par les conséquences du changement climatique sur l’océan et la cryosphère. « La haute mer, l’Arctique, l’Antarctique et la haute montagne peuvent sembler lointains à bien des gens, a déclaré Hoesung Lee, président du GIEC lors de cette présentation. Or nous dépendons d’eux et sommes marqués, directement ou indirectement, par leur influence de bien des façons ». Un monde à + 3°C se profile d’après les scientifiques. Seule parade envisagée : réduire au plus vite les émissions de CO2.

Troisième acte : la Blue COP

décembre 2019

S.A.S. le Prince Albert II de Monaco, est présent lors de la « Blue COP », la Conférence sur le climat de Madrid qui réunit 196 Parties. L’océan figure au centre de l’intervention du Souverain. A Sa suite, bien établie dans son rôle de plaidoyer, en étroite collaboration avec la Fondation Prince Albert II de Monaco, la Plateforme Océan et Climat présente un nouvel appel : « Un océan en bonne santé, un climat protégé ». Elle contribue également au guide « Ocean for Climate » produit par Because the Ocean et destiné aux gouvernements soucieux d’honorer leurs engagements nationaux pour le climat. Une série de mesures concrètes (énergies marines renouvelables, transport maritime, politique d’adaptation, de conservation des écosystèmes) est proposée afin que les Etats puissent mieux assurer la protection de l’océan. Les conventions internationales étant rarement contraignantes, la nécessité de construire une véritable systémie positive s’impose. Si la Conférence de Madrid n’a pas permis de relever l’ambition des Parties dans la lutte contre le changement climatique, néanmoins, et pour la première fois, la décision finale a reconnu l’importance de l’océan et a lancé un processus qui vise à renforcer les liens entre les politiques et les stratégies relatives au climat et à l’océan – un résultat que l’initiative Because The Ocean poursuivait depuis plusieurs années. Fortement ancrée dans la science, au service de la politique climatique, la Plateforme Océan et Climat poursuit son engagement pour accompagner les Etats à intégrer l’océan dans leur politique climatique.

Quatrième acte : 2020-2021

« Les politiques climatiques sont les héritières des sciences du climat qui se sont d’abord intéressées à la physique et la chimie. Aujourd’hui, notre priorité est d’intégrer la biologie au cœur des prises de décisions pour la simple et bonne raison que la biologie des océans joue un rôle majeur dans la question climatique », expose Romain Troublé, président de la Plateforme, directeur général de la fondation Tara Océan. Dans l’équation océan/climat, la Plateforme intègre donc cette nouvelle donne : le territoire océan est un écosystème planétaire. « La Convention sur la diversité biologique, est particulièrement attentive aux écosystèmes terrestres, précise Raphaël Cuvelier, vice-président de la Plateforme Océan et Climat et conseiller au sein de la Fondation. Il n’est que très peu question de la dimension marine ou climatique. Nous travaillons à établir un pont afin que les spécialistes du climat puissent parler à ceux de la biodiversité. La Plateforme est là pour jouer un rôle important dans ce décloisonnement. » Le nouveau plaidoyer qu’elle portera auprès des plus hautes instances et futures COP, notamment celle de la Diversité biologique et celle du Climat, comporte plusieurs axes prioritaires, dont l’intérêt des aires marines protégées ou l’épineuse question du carbone bleu qui demande encore à être passée au crible de la science. La pièce n’est pas finie.

Carte d’identité

Forte de la participation de près de 85 membres, la Plateforme Océan et Climat incarne une interface entre science et politique, et favorise la réflexion et les échanges entre la communauté scientifique, la société civile et les décideurs politiques. Cette coalition rassemble, autour d’une communauté de valeurs, instituts de recherche, organisations non-gouvernementales, établissements d’enseignement supérieur, aquariums, représentants du secteur privé et institutions françaises et internationales.